• Parlons de Balzac et d’Eve Hanska , ça fait du bien….

    Ewelina Rzewuska Portrait par Holz Sowgen, vers 1825« Parlons de Balzac, cela fait du bien », écrivait Gérard de Nerval. Auteur, entre autres, d'« Eugénie Grandet », du « Père Goriot » et du merveilleux “Lys dans la Vallée”, Honoré de Balzac crée au total 91 romans et nouvelles de 1829 à 1852 (137 prévus) et plusieurs milliers de personnages répertoriés. 
    Évelyne Hanska est une jeune polonaise qui vit en Ukraine avec ses cinq enfants et son mari, de vingt-ans son ainé. Très portée au mysticisme, elle s’ennuie ferme et lit beaucoup de romans français. Elle tombe sur Balzac dont elle devint une fervente admiratrice. À partir de 1832, elle lui transmet chez son éditeur, Léon Gosselin, une lettre signée “l’Étrangère”, perdue depuis, qui attira l’attention du romancier.  Dans sa deuxième lettre, que nous avons, le ton est donné :
    « Vous devez aimer et l'être: l'union des anges doit être votre partage ; vos âmes doivent avoir des félicités inconnues ; l'Étrangère vous aime tous les deux et veut être votre amie... Elle aussi sait aimer ; mais c'est tout... Ah! vous me comprendrez ! ».
    Elle engagea avec l’auteur une correspondance qui dura dix-sept ans de 414 lettres. Au lieu de jeter ces lettres venues du bout du monde au panier, Balzac enquêta et apprit qu’il s’agissait “d’une grande dame, jeune, belle, comtesse, colossalement riche, mariée à un homme qu'elle n'aimait pas, supérieure par l'intelligence et par le cœur à toutes les autres femmes”. Cette description, on s’en doute, enfiévra le romancier.
    Ils se rencontrèrent pour la première fois le 25 septembre 1833 au bord du lac de Neuchâtel.

    L’écrivain tomba follement amoureux de cette brune potelée et distinguée, mais la comtesse, qui était venue avec sa fille et son mari, le trouvait petit, gros et assez laid. Ils avaient tous deux la trentaine. Le premier grand amour de Balzac, Laure de Berny, approchait les cinquante-six ans et disparut en 1836. Balzac reporta alors toute sa ferveur sur celle qu’il retrouvait dans plusieurs villes d’Europe (Quatre fois seulement en Quinze ans !) mais où, toujours, elle se refusait à son soupirant, jalouse de ses frasques et autres aventures sentimentales. Comme il écrivait quatre livres à la fois, il pouvait bien aimer pareil.

    A chaque rencontre, il recherche le réconfort, se fait câlin, doux, tendre et amoureux. Intérim délicat entre le travail de forçat de la plume et les jupons de basse-ville. Pour Balzac, obéré de dettes et d’affaires ruineuses, l’épouser devient une obsession, elle lui ouvre sa bourse autant que son cœur. Car elle n’a de cesse de rêver à ce Paris retentissant, romantique, féérique où elle se promènera avec le plus grand romancier de la terre. Du fond de la steppe, Paris n’est que félicité. Elle est veuve depuis 1842.

    Elle ne partit jamais, mais lui : oui, qui fait ses bagages pour la Russie, ruiné par la faillite de la compagnie des chemins de fer du Nord en 1848. Et il revint deux ans plus tard, fatigué, malade, mais marié à la belle, pour s’installer au 12 de l’avenue Fortunée (l’avenue porte son nom aujourd’hui). 
    Balzac sera emporté en six mois par la maladie, par ce “cercle de fer qui enserre sa poitrine” Même si le cerveau, lui, demeurait intact. La nouvelle Mme de Balzac, qui n’avait connu que des malheurs depuis son arrivée, courait la ville, suivie des créanciers, nerveuse, chez les parents polonais, les amis russes. La désillusion était immense. Les espoirs s’étaient envolés et la sombre réalité de la vie parisienne de l’écrivain donnait des nausées à l’épousée romanesque.
    « dix-huit ans d'amour, seize ans d'attente, deux ans de bonheur et six mois de mariage » dira Gonzague St Bris.

    Pour son réconfort, elle se jette dans les bras du peintre Jean Gigoux, qui souhaitait faire son portrait. Il est beau, musclé, joyeux et a de longues moustaches de guerrier Gaulois. Victor Hugo fera une description atroce de la mort de Balzac, abandonné de tous, mais rien ne surpassa l’affront, présenté par Octave Mirbeau, de l’aveu du peintre chéri, qui affirmait batifoler dans une chambre voisine avec Évelyne Hanska dans ces instants terribles de l’agonie. Ces révélations, faites en 1907, firent un scandale énorme et les extraits durent être retirés à la demande d’Anna, la fille de Mme Hanska.

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    Franck Ferrand et Gonzague St Bris nous parlent d’Eve Hanska et d’Honoré de Balzac (Europe1.fr - Au cœur de l'histoire - Balzac - http://bit.ly/kQgM8U)



    Quelques lettres de Balzac à Madame Hanska - Une correspondance enflammée !