• Georges Brassens et les dames du temps jadis

    Le parc Georges BrassensSi vous passez par la rue d’Alésia, dans le 14ième Arrondissement, continuez vers Plaisance. Sur la droite, vous trouverez une station-service, une des dernières et là, l’impasse Florimont, avec des maisons colorées. C’est ici, au numéro 9, que Georges Brassens vécut la plus grande partie de sa vie.
    Au tout début de l’impasse, une plaque rappelle que son ami et contrebassiste Pierre Nicolas, habitait aussi ici. Mais Georges, lui, vivait chez Jeanne, au bout de l’impasse, dans la maison à l’entrée de laquelle repose un chat. Bien avant, en 1943, il est réquisitionné pour le STO et part pour l’Allemagne. En mars 1944, il bénéficie d’une permission de 15 jours. Il n’y retournera pas. Pour sa clandestinité, il trouvera refuge Impasse Florimont chez Jeanne et son mari Marcel Planche. On s’y lave à l’eau froide, il n’y a ni gaz, ni électricité, ni radio, ni le tout-à-l’égout. Dans la petite cour, une vraie ménagerie : chiens, chats, canaris, tortues, buse… et la fameuse cane qu'il célèbrera dans une chanson.

    Il est loin de se douter qu’il y restera 22 ans. Dans ce cocon, il se lève à cinq heures du matin et se couche avec le soleil, rythme qu'il gardera d’ailleurs toute sa vie. Il passe son temps entre la bibliothèque et les copains anarchistes, écrit son roman et compose avec un banjo et un piano d’héritage de sa tante. Pour ne pas attiser la jalousie de Jeanne, Georges vit des amourettes clandestines.
    Il devra attendre 1953 pour connaître le succès, grâce à Patachou puis aux trois-baudets. En 1955, Brassens fait l’acquisition de la maison des Planche et de celle qui lui est mitoyenne pour l’agrandir. L’eau et l’électricité installées, il la leur offre. La vie continue comme avant, il est interdit de la radio d’Etat, seul Europe 1 le diffuse.

    Allons chez Georges BrassensMais la maison de Jeanne, impasse Florimont, devient trop petite pour recevoir les copains. Pour vivre comme il l'entend, il jette son dévolu, en 1958, sur le moulin de La Bonde, au bord du Ru de Gally, à Crespières, dans les Yvelines. Il y restera jusqu'en 1971. Il y recevait Marcel Amont, Guy Béart, Georges Moustaki, Jacques Brel,  Boby Lapointe, Lino Ventura, Raymond Devos, Chabrol, Bourvil, Fred Mella. Il chantera avec Trenet une seule fois, en 1966. Jeanne , elle, refusait de s’y rendre. Pour rompre sa solitude, elle se remarie à 75 ans, en 1966, avec un jeune homme de 37 ans. Contrarié par ce mariage, Brassens quitte l'impasse Florimont pour emménager dans un duplex près de la place Denfert-Rochereau, où Jacques Brel est son voisin. Certains disent que ce serait-elle qui l’aurait mis dehors suite à une dispute. Elle mourra à 77 ans, Georges était à son chevet avec René Fallet.
    Si vous continuez, toujours dans la rue d’Alésia qui devient rue de Vouillé, vous trouverez sa dernière résidence parisienne, au 42 rue Santos-Dumont, dans l’ancien village de Vaugirard, devenu 15ième Arrondissement. En chemin, vous pourrez aussi voir son buste, par André Greck, dans le parc qui porte son nom et qui a remplacé les anciens abattoirs aux chevaux de Vaugirard en 1985.

    Une idée et un décor dont on fait les chansons, ce qui ne lui aurait certainement pas déplu. S’il repose à Sète, face à la mer, c’était son vœu, “Supplique pour être enterré sur la plage de Sète”, la poésie de Brassens est bien toujours en ces lieux, entre le marché du livre ancien et d’occasion et les objets trouvés. Il y a beaucoup de monde, des balançoires, des enfants, des touristes, des joggeurs, mais pas de Vénus de barrières, de  Manon, de Suzy. Mon prince, on a les dames du temps jadis qu’on peut.